Figurant parmi les cinq lignes qui vont bénéficier dans les prochains mois de travaux cofinancés par des fonds publics et privés, la ligne capillaire fret dite du bec d’Ambès fait partie intégrante du grand port maritime de Bordeaux. Cette ligne de 15 kilomètres desservant la plate-forme industrielle multimodale de la presqu’île d’Ambés rassemble les industries de la pétrochimie. Cette ligne nécessite une remise à niveau correspondant à un investissement de 20 millions d’euros. Ainsi, pour boucler le montage financier, ce dernier a-t-il fait appel à État, la région Aquitaine, Bordeaux Métropole et SNCF Réseau. Mais aussi aux fonds européens au titre du réseau transeuropéen de transport (RTE-T), la ligne contribuant à la desserte ferroviaire du port. Ces subventions représentent 20 % de l’investissement, soit 4 millions d’euros. Les travaux vont débuter au printemps prochain.
Des entreprises impliquées localement
Les entreprises embranchées, au nombre de huit actuellement, vont également participer à la maintenance de cette ligne. Elles ont en effet accepté de payer le surcoût lié à la perte de chiffre d’affaires en raison de la fermeture pendant cinq mois de la ligne pendant la durée des travaux sur cette voie qui changera de gouvernance à l’été 2016. Cette ligne sera définitivement sortie du réseau national. Le port de Bordeaux va donc se substituer à SNCF Réseau. Pour ce faire, une filiale baptisée Capilrail est en cours de création. Outre le port de Bordeaux qui en sera l’actionnaire majoritaire, SNCF Réseau et des entreprises privées, sont pressenties dans le nouveau tour de table qui sera, selon Christophe Masson, président du directoire du grand port maritime de Bordeaux « bouclé d’ici la fin de l’année ».
Création du premier gestionnaire d’infrastructure privé en Aquitaine
« Ce montage juridique et financier consacre l’émergence d’un nouveau modèle économique et d’un nouveau mode de gouvernance de gestion des voies. Il implique dans ce projet une mobilisation de tous les acteurs : l’Etat, les collectivités territoriales, les embranchés et le port. En 2016, Capilrail se posera en premier gestionnaire d’infrastructure en Aquitaine pour ce type de ligne fret. Un nouveau référentiel travaux est en cours d’élaboration sous la responsabilité de l’EPSF (Autorité française de sécurité française). Dans ce nouveau modèle, il n’est pas question de sacrifier la sécurité ferroviaire. « Nous aurons les mêmes exigences que celles imposées sur les voies du réseau ferré portuaire », explique Christophe Masson. Et celui-ci de préciser : « Les tarifs d’utilisation de la ligne appliqués aux chargeurs seront plus élevés que ceux de SNCF Réseau. Les chargeurs se disent prêts à payer ce surcoût dès lors que la qualité de service est assurée. Des contrats de base vont être noués avec les chargeurs sur l’utilisation de la ligne dans la durée ».
Sur cette ligne secondaire, Socorail qui a déjà noué un contrat avec le port de Bordeaux pour la maintenance des infrastructures du réseau ferré portuaire, pourrait voire ses activités élargies à cette ligne. «Capilrail compte lancer des appels d’offre pour certaines prestations d’exploitation et de maintenance », commente Christophe Masson. Les chargeurs pourront également choisir à leur gré le tractionnaire qui leur convient. Un nouveau point d’étape sur l’ensemble de cette dynamique sera fait lors de la prochaine conférence prévue à la mi-2016.
L’objectif du grand port maritime de Bordeaux est de faire du volume. Actuellement, huit entreprises spécialisées dans la pétrochimie opèrent sur cette ligne. A raison de 250/260 trains par an, elles assurent un trafic ferroviaire annuel de 300 000 tonnes par an, essentiellement de matières dangereuses, et ont créé quelque 3000 emplois directs et 6 000 emplois indirects localement. « Les trafics de wagons isolés représentent 30 % de l’activité fret de la gare de tri d’Hourcade à Bordeaux » précise Christophe Masson qui envisage d’autres développements ferroviaires dans la zone portuaire. Disposant de réserves foncières de plus de 80 hectares mobilisables, le port de Bordeaux cherche à développer sa desserte multimodale en accueillant de nouvelles activités industrielles. « L’intérêt est de réunir au sein de cette plate-forme tous les modes maritimes, ferroviaires et routiers », souligne-t-il avant d’ajouter : « Selon les activités mises en place, on peut facilement envisager une hausse significative de l’ordre de 50 à 100 % de l’utilisation de la ligne ».
D’autant que le grand port maritime de Bordeaux (45 millions de chiffre d’affaires par an), entend multiplier par trois la part du ferroviaire (5% actuellement), d’ici 5 ans. Le sujet est d’importance puisque le port se situe près d’une grande agglomération au bord de la congestion routière. « Nous étudions la réhabilitation d’autres lignes capillaires, notamment pour des embranchés céréaliers comme la ligne entre Agen (Lot-et-Garonne) et Auch (Gers) qui va également bénéficier des subventions européennes, mais aussi d’autres voies dans le quart Sud-Ouest. », annonce le président du directoire du grand port maritime de Bordeaux.
L’AFRA est en faveur d’appel d’offres pour l’attribution des marchés
Lors de la dernière conférence sur la relance ferroviaire l’AFRA a interpellé le gouvernement sur la création de PGI (prestataire de gestionnaire d’infrastructure), et sur le lancement des travaux de maintenance sur le réseau capillaire. « Pour la création de nouveaux prestataires de gestion d’infrastructure, SNCF Réseau doit veiller à faire des appels à manifestation d’intérêt (AMI) », réclament les membres de l’Association ferroviaire. Et ces derniers d’ajouter : « Les contrats de maintenance signés avec les nouveaux gestionnaires d’infrastructure doivent obligatoirement s’accompagner d’appel d’offres ».