En donnant son feu vert à la cession de sa branche énergie à l’américain General Electric (GE), le groupe Alstom va devoir s’inventer un nouvel avenir dans la construction ferroviaire. Privé de 70 % de ses activités, le fleuron français dispose désormais d’une manne financière de 12,35 milliards d’euros qui va lui permettre d’apurer ses dettes (3,1 milliards d’euros en mars 2015), et surtout d’afficher ses ambitions à l’international.
Avec la fusion des deux fabricants de trains chinois CNR et CSR, le rachat de l’italien AnsaldoBreda par le japonais Hitachi, Henri Poupart-Lafarge, l’actuel président d’Alstom Transport et le successeur annoncé de Patrick Kron en 2016 à la tête du groupe français, entend bien se lancer dans la course.
Pour autant, la stratégie à mener s’annonce délicate dans un secteur en pleine consolidation. Dans le cadre des accords conclus avec GE, le groupe Alstom récupère les activités de signalisation du groupe américain. Une activité de 400 millions d’euros de chiffre d’affaires réalisés à 60 % aux Etats-Unis et pour une grande partie dans le fret. « De quoi nous apporter de nouvelles technologies dans le fret et les fruits de leurs développements récents dans le contrôle des trains », avait déclaré Henri Poupart-Lafarge au salon ferroviaire Innotrans à Berlin l’an dernier.
« Une alliance globale dans le ferroviaire »
Le groupe français compte bien développer des synergies avec GE dans le ferroviaire. Outre la mise en œuvre une politique commune sur les achats, GE pourrait soutenir Alstom dans le financement d’opérations dans un secteur devenu très concurrentiel. Surtout s’il étudie, selon la rumeur, un rapprochement avec le canadien Bombardier , lequel a rejeté en août dernier l’offre du groupe public chinois Beijing Infrastructure Investment (BII) pour le rachat de ses activités ferroviaires et qui s’apprête à mettre en Bourse une part du capital de sa branche ferroviaire.
D’autres synergies avec GE sont également envisagées dans la maintenance des locomotives diesel de GE. De même, Alstom pourra compter sur la puissance commerciale de GE aux Etats-Unis.
Un marché en France à la peine
Le développement du groupe à l’international est d’autant plus important que le marché français de l’industrie ferroviaire s’essouffle. Dans un communiqué daté du 22 juillet 2015, la Fédération des industries ferroviaires (FIF) a même donner l’alerte notamment en matière de « pérennisation des financements des investissements publics ou encore de commandes de rames TET à hauteur de 1,5 milliards d’euros (qui s’ajoutent aux 500 millions d’euros déjà engagés) ».
La FIF (Fédération des industries ferroviaires) considère en effet que les propositions faites par les pouvoirs publiques sont « sous-dimensionnés par rapport à l’urgence et l’ampleur de la problématique des plans de charge des constructeurs de matériel roulant ».
Les commandes de TER Regiolis par les régions sont moins importantes que prévu et la SNCF a repoussé la commande de nouveaux TGV à 2020. « Une catastrophe industrielle et humaine dans les trois prochaines années », prévient, la Fédération. Sur les 10 sites de production ferroviaire que compte Alstom en France, 3 (Reichshoffen, la Rochelle-Aytré et Belfort), afficheraient un plan de charge préoccupant. La pérennité de son outil industriel en France est au cœur de la stratégie du nouveau groupe Alstom.