L’évolution du fret ferroviaire, depuis la réforme ferroviaire initiée il y a 20 ans en Allemagne et l’ouverture complète du marché qu’elle a amenée, peuvent être considérées comme satisfaisantes. Non seulement le trafic s’est accru de 40 % en dix ans, mais la part modale du rail dans le transport de marchandises est passée de 18,4 à 23,1 % alors même qu’elle stagnait en moyenne dans l’UE. Ce succès, qui s’appuie sur la puissance industrielle du pays et l’avantage stratégique d’un réseau ferré très dense, ne doit pas masquer des évolutions contrastées. Entre, d’une part la tendance au déclin du fret classique (produits énergétiques et chimiques, minerais, métaux, équipements de transport) qui a atteint 5 % entre 2008 et 2013 ; et, d’autre part la forte progression du transport combiné (près de 15 % entre 2005 et 2012), à rapprocher de celle des containers (+ 33 %).
Essor du transport combiné
C’est précisément sur le transport combiné, faisant appel à des trains entiers, que les nouveaux opérateurs de fret — on en recense près de 300 — ont réalisé leur plus forte percée. Entre 2007 et 2013, leur part de marché est passée de 19,7 à 33,2 %. Les principaux concurrents de DB Schenker Rail, filiale de la Deutsche Bahn, sont des filiales d’opérateurs historiques étrangers : Captrain (SNCF Geodis : 4,9 % de parts de marché en 2012), TX Logistik (Trenitalia : 3,5 %), SBB Cargo (Chemins de fer suisses : 3,2 %). L’opérateur allemand Rhein Cargo dépasse également les 3 % de parts de marché. DB Schenker Rail reste toutefois le premier opérateur en Allemagne (67 % du marché en 2013) en même temps que le premier groupe intégré sur le marché européen du fret. La souplesse de son offre lui permet d’apporter une vraie alternative au transport routier.
Relance du wagon isolé
DB Schenker Rail est aujourd’hui l’un des rares opérateurs allemands à proposer le service « wagon isolé » aux acteurs de l’industrie traditionnelle. À partir de 2012, il a mis en oeuvre la stratégie « Netzwerkbahn » afin de le relancer. Cette stratégie s’appuie sur un système informatisé de réservation précoce permettant d’agréger les wagons isolés, en écho au réseau international XRail, alliance de sept opérateurs de fret européens lancée en 2010 et opérant dans dix pays. Sa mise en oeuvre n’a été possible que grâce à une étroite concertation. Les salariés de l’entreprise et les clients y ont été associés, de la conception à la mise en place, en passant par une phase de test. Tous les acteurs du fret ferroviaire allemand sont toutefois confrontés à la montée des coûts de l’énergie. Ainsi que le soulignait récemment Alexander Hedderich, président de DB Schenker Rail, « l’abandon du nucléaire et le choix des énergies renouvelables ont un impact financier direct sur le secteur. Le prix de l’électricité connaît ainsi une progression à deux chiffres ». Une forte contrainte de coûts à laquelle s’ajoute la législation antibruit et qui nécessite un renouvellement des matériels roulants. Dans ce contexte, l’impérative modernisation du réseau ne pourra se réaliser sans un accroissement de l’investissement public dans les infrastructures.